L’ambassadeur du Mali en France a été convoqué jeudi à Paris, après avoir accusé des soldats français de “débordements” dans les quartiers chauds de Bamako, des propos jugés “faux et inacceptables” par la France, soucieuse de contenir le sentiment antifrançais au Sahel.
Toumani Djimé Diallo a été convoqué au ministère français des Affaires étrangères, a appris l’AFP. “On lui a exprimé notre indignation devant ses propos sans fondement et choquants de la part d’un pays allié dans la lutte contre le terrorisme”, a-t-on précisé au ministère.
“Les messages qu’on reçoit des autorités maliennes sont à la hauteur de la gravité des propos”, a-t-on ajouté sans plus de précision, laissant supposer que Bamako était peut-être plus embarrassé que solidaire de la saillie de son diplomate.
Mercredi, l’ambassadeur du Mali avait dénoncé devant la commission Défense du Sénat français les “problèmes” posés selon lui par la Légion étrangère sur le sol malien, en évoquant des “débordements” dans les quartiers chauds de Bamako.
“Par moments, dans les Pigalle de Bamako, vous les retrouvez, tatoués sur tout le corps, en train de rendre une image qui n’est pas celle que nous connaissons de l’armée (française). Ça fait peur, ça intrigue”, avait-il déclaré, mentionnant explicitement les légionnaires, pourtant absents de la capitale malienne selon l‘état-major.
Des propos très mal vécus à Paris, alors que la force Barkhane fait face depuis de nombreux mois à la montée d’un sentiment anti-français au Sahel.
Huile sur le feu
Les militaires français, présents dans la région depuis 2013 pour lutter contre les jihadistes, viennent de voir leur nombre passer de 4.500 à 5.100 face à la recrudescence des attaques.
Ces violences – souvent entremêlées à des conflits intercommunautaires – ont fait 4.000 morts au Mali, au Niger et au Burkina Faso en 2019, cinq fois plus qu’en 2016, selon l’ONU.
La France a elle-même perdu 13 soldats dans un accident entre deux hélicoptères en opération au Mali, en novembre. Et Paris s‘était ouvertement agacé, fin 2019, d’un soutien jugé trop timide de la part notamment des autorités africaines, dont le Mali.
Au sommet du 13 janvier à Pau (sud de la France), réunissant le président français et les chefs d’Etat du G5 Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad, Mauritanie), les Africains avaient été ainsi priés par l’Elysée de “clarifier” leur position sur la présence française au Sahel.
Les propos de l’ambassadeur malien ont remis de l’huile sur le feu, et provoqué une réaction épidermique jeudi du cabinet de la ministre des Armées, dans une déclaration transmise à l’AFP.